Alors qu’une ferme pilote de trois éoliennes s’apprête à tourner ses pâles au large de Fos, les projets avancent. Un parc offshore de 15 à 20 éoliennes doit naître à l’horizon 2029 à 22 kilomètres des mêmes côtes. Pour appuyer le dessein, le Grand port envisage, avec Deos, la création d’ici 2028 d’une plateforme de construction et de stockage de flotteurs.
Avec les projets H2V, GravitHy ou Elyse, une PME qui conçoit des carburants synthétiques, l’hydrogène est l’autre usine à rêves de la décarbonation, même si son modèle est très coûteux. Tous s’appuient sur l’arrivée annoncée par Emmanuel Macron, d’ici 2030 au Cavaou, de H2Med, un pipeline espagnol transportant l’hydrogène vert. "Si on ne décarbone pas l’industrie, on pourra être sur une forme de décroissance, craint Martial Alvarez, maire de Port-Saint-Louis-du-Rhône. Il y a un alignement des planètes sur le territoire de Fos. Ce territoire est le mieux situé géographiquement pour servir de hub aux énergies renouvelables".
Il y a évidemment des réserves à cette rapide effervescence. D’abord, le marché du renouvelable part de très loin en France. "On a longtemps été exportateurs d’électricité grâce au nucléaire, souligne Jules Nyssen, président du syndicat des énergies renouvelables qui représente 540 entreprises en France. L’exigence de sobriété énergétique a entraîné une baisse de la consommation et le renouvelable n’apparaît pas si nécessaire, sauf volontarisme politique. En attendant le basculement vers l’hydrogène vert pour l’industrie et le tout voitures électriques, ça patine un peu".
D’autant que face à la puissance d’innovation et au dumping chinois, les Européens, mal protégés, souffrent. À Nantes, Systovi, un fabricant français de panneaux solaires, vient d’être placé en liquidation judiciaire. "Il n’y a pas de nouveau projet éolien en dehors de ce qui a été imaginé à l’horizon 2030. Une entreprise de Cherbourg, LM Wind, met la moitié de ses salariés au chômage technique", s’inquiète par ailleurs Clément Mochet, directeur de projets chez Eolymar, l’un des treize candidats à l’appel d’offres pour l’éolien flottant dans le golfe de Fos.
Il y a ensuite l’acceptabilité d’une telle révolution industrielle par les habitants. Les associations environnementales s’inquiètent des conséquences de cette industrialisation sur les sols et la biodiversité, tandis que des conflits d’usages émergent avec les pêcheurs ou les riverains. "Tous ces projets peuvent être une chance, mais je sens la population déconcertée et un manque de vision globale", pointe le député communiste de Martigues, Pierre Dharréville. Les infrastructures routières et ferroviaires ne sont pas visibles. "Nous manquons aussi de services publics, comme à l’hôpital de Martigues, pour accueillir ces investissements exceptionnels". Si les enquêtes publiques et réunions de concertation se multiplient, elles n’éclairent pas tout. "On mesure au quotidien combien il faut faire comprendre les choses à des gens soucieux des enjeux de santé publique, de maintien de l’emploi et de la qualité environnementale, souffle Martial Alvarez. C’est parfois épuisant et on sait que le courage est fluctuant chez les élus. Mais il y a un intérêt commun". Et si on lui trouvait un nom ?
SOURCE: LAPROVENCE.COM