[CULTURE] Camargue : des gravures du paléolithiques découvertes sur un site de stockage de déchets
Les découvertes, exceptionnelles, ont été faites sur le site de stockage de déchets de Bellegarde
Publié : 9 mai 2023 à 12h31 par Ch. V Rios
Le site de stockage et de traitements des déchets de Bellegarde est facilement repérable, lorsqu'on emprunte l'autoroute A 54 entre Arles et Nîmes. C'est dans ce périmètre que des découvertes archéologiques exceptionnelles ont pu être mises au jour. Dans le cadre de l'extension du site, des fouilles préventives ont été menées par l'Inrap. En toute discrétion, après un premier diagnostic en 2015, un travail de fourmi était mené jusqu'à la fin de l'année 2016. L'Institut national de recherches archéologiques préventives a révélé l'importance de ces trouvailles voilà quelques semaines seulement, choisissant de se concentrer dans un premier temps sur l'étude et la documentation des fouilles. Car l'opération était énorme, avec 70 archéologues mobilisés. "On est intervenu sur 25 hectares, la taille du projet d'extension de Suez environnement, et sur ces 25 hectares nous en avons fouillé six. Plus d'un millier de structures ont été mises au jour, c'est un chantier d'une taille assez démentielle. On a trouvé des occupations qui s'échelonnaient du paléolithique supérieur au Moyen Âge. Et les résultats des fouilles sur la zone paléolithique se sont avérées très riches, bien plus riches que ce qu'on attendait", raconte Marilyne Bovagne, responsable scientifique de l'opération pour l'Inrap.
"Ce qui est inattendu, c'est de trouver un site de plein air à cet emplacement-là. On n'aurait jamais eu l'idée d'aller faire des recherches là s'il n'y avait pas eu ce projet d'aménagement, parce que ce n'est pas une zone avec des grottes, qui font penser à des occupations très anciennes, ajoute Vincent Mourre, préhistorien et archéologue à l'Inrap. Et les découvertes sont aussi inattendues. La présence d'art mobilier, c'est quelque chose de nouveau dans le secteur."
Dans le sud-est de la France, ces découvertes d'oeuvres d'art réalisées sur des supports transportables sont totalement inédites. Parmi les merveilles mises au jour par les spécialistes, il faut remonter à - 20 000 avant notre ère. À cette époque-là, ce sont des profils de chevaux qui sont représentés, certains avec des détails anatomiques très précis, le tout sur des plaquettes de calcaire gréseux faisant à peu près la taille de la paume de la main. Du début du Magdalénien, on passe au Magdalénien moyen, avec une plaquette réalisée en - 16 000, et interprétée comme représentant une vulve de femme, figurée de manière exagérée et disproportionnée, encadrée par le haut des jambes. Une "Origine du monde" paléolithique réalisée aux portes de la Camargue, des milliers d'années avant le tableau iconique de Courbet, en somme. "On a toujours tendance à survendre un peu les choses, mais là, il y a vraiment matière à parler de découvertes exceptionnelles, pour l'ensemble du gisement et pour toutes les périodes, par la diversité des occupations et leur récurrence", assure Vincent Mourre. Plus précisément, concernant le paléolithique, période qui a livré le plus de trésors, "on a une quinzaine de niveau d'occupations, sur cinq grandes phases d'occupation sur toute la durée du Magdalénien. On a des centaines de milliers de silex, et ces oeuvres d'art. Cette conjonction de découvertes, c'est vraiment exceptionnel dans le sud de la France !", complète le préhistorien.
Le grand public pourra-t-il bientôt admirer ces formidables objets ? "Notre souhait, c'est de les présenter au plus grand nombre", répond Vincent Mourre. Une exposition temporaire, dans un lieu adapté, est envisagée, mais le processus est à peine entamé et aucune date n'est encore avancée.
Source: laprovence.com