[ Société ] Pierre F., patron de LocBateau, jugé pour travail dissimulé : le tribunal de Marseille se penche sur ses méthodes
Pierre F., patron de LocBateau, a comparu devant le tribunal correctionnel de Marseille pour travail dissimulé. Des stagiaires et auto-entrepreneurs non déclarés travaillaient à plein temps pour son entreprise, dans des conditions discutables. L'Urssaf a réclamé un redressement de plus de 44 000 €. La procureure a requis 10 mois de prison avec sursis et une interdiction d'accès aux marchés publics.
Publié : 21 octobre 2024 à 12h10 par Camille .
Un réseau d'auto-entrepreneurs et de stagiaires non déclarés au cœur de l'affaire LocBateau
Pierre F., le dirigeant de la société LocBateau, qui disposait de 18 bateaux à louer, a été jugé à Marseille pour travail dissimulé. Le chef d'entreprise recrutait principalement des stagiaires issus de formations en tourisme, soit non rémunérés, soit indemnisés au minimum légal. À la fin de leur stage, il leur suggérait de s'inscrire en tant qu'auto-entrepreneurs s'ils souhaitaient continuer à travailler pour lui.
Lorsque les inspecteurs de l'Urssaf sont venus vérifier la situation, Pierre F. a affirmé que ces auto-entrepreneurs n'étaient que des "apporteurs d'affaires". Cependant, les témoignages des employés ont révélé qu'ils l'appelaient "patron", portaient l'uniforme de l'entreprise, et travaillaient à plein temps, voire davantage. Leur rôle consistait à accueillir les clients, gérer les locations et assurer l'entretien des bateaux. Il a également été signalé que les heures supplémentaires étaient parfois "oubliées" ou réglées en liquide ou en carburant.
Lors de l'audience au tribunal correctionnel, Pierre F. a expliqué que son entreprise, en pleine expansion, avait vu sa flotte passer de 4 à 18 bateaux en 2020, notamment grâce à un marché public. Il a évoqué ses difficultés à suivre le volet administratif de cette croissance rapide : "Je n'avais qu'une petite structure, je n'étais pas en mesure de gérer les fiches de paie. Je suis ingénieur de formation. Ce qu'on demande à un entrepreneur en France est tellement compliqué", a-t-il plaidé.
L'Urssaf, ayant constaté plusieurs irrégularités, a réclamé un redressement de plus de 44 000 €. Les enquêteurs ont interrogé une quinzaine d'anciens stagiaires ou auto-entrepreneurs, dont la majorité a décrit un rythme de travail intense en période estivale. Certains ont cependant parlé de bonnes relations avec Pierre F., qui supervisait leur travail via une caméra connectée à son téléphone.
Lors des témoignages, une ancienne employée a hésité lorsqu'on lui a demandé si elle se sentait exploitée. "C'était l'un de mes premiers stages. Sur le moment, non. Mais avec le recul, oui", a-t-elle admis. La procureure, Irina Ternova, a requis 10 mois de prison avec sursis, une amende de 50 000 €, ainsi qu'une interdiction d'accès aux marchés publics pendant 5 ans.
Source : LaProvence